Votre site respecte les standards internationaux d’accessibilité. Cette phrase a malheureusement peu de chances de refléter la réalité, mais peu importe, plaçons-nous dans cette situation et si c’est le cas, je vous en félicite. Cela signifie que vous n’introduisez pas de discriminations et que les personnes handicapées sont en mesure d’accéder aux contenus de votre site web.
C’est évidemment essentiel mais ce n’est pas assez.
Tout d’abord, les utilisateurs de sites web ne viennent pas uniquement chercher des contenus, mais aussi des services. Ils demandent une attestation, ils achètent en ligne, ils veulent parler à un humain. Ils demandent de l’aide, de l’assistance. Cela veut dire que l’essentiel de la valeur ajoutée ne réside pas forcément dans ce que vous affichez en ligne, mais aussi dans les services que vous proposez hors ligne.
Même si vos contenus sont accessibles, ils peuvent être de piètre qualité, l’expérience utilisateur peut être complexe ou incompréhensible, les services associés désastreux, l’impact sur l’environnement non négligeable. Autrement dit, vos contenus et services peuvent présenter des problèmes majeurs de non-qualité. Cette non-qualité va avoir un impact sur tous vos utilisateurs sans distinction, et l’on pourrait se dire, après tout, que nous n’introduisons pas de discrimination et que nous avons fait le nécessaire.
Mais cela revient à dire que tous les utilisateurs sont égaux devant la non-qualité. Cela revient également à dire qu’un produit mal décrit, qu’une faille de sécurité, que l’impossibilité de se déconnecter d’un espace privé, que l’impossibilité de résilier un service en ligne… a le même impact sur les personnes handicapées, sur les personnes âgées, sur les réfugiés, sur les personnes non alphabétisées, sur les personnes en situation de grande précarité, sur les SDF (Sans Domicile Fixe)… que sur le reste de la population.
Ce n’est pas le cas.
J’affirme ici que la non-qualité a des effets beaucoup plus graves sur la vie de ces populations. J’affirme que non, nous ne sommes pas égaux devant la non-qualité et que oui, si l’on se soucie vraiment de ces personnes, il est de notre devoir de proposer des contenus, des services, accessibles, sûrs, faciles à utiliser, simples, fiables, sobres et performants.
Éditorial du N° 93 la newsletter Opquast.
J’ai une poussée d’urticaire chaque fois que j’entends « intuitif », pour qualifier un site ou un service web. Cela ne veut strictement rien dire et balaye d’un revers de vocabulaire l’effort fourni par l’utilisateur·rice, et l’accumulation d’expériences antérieures qui l’aide à s’y retrouver (ou pas). Alors, bravo pour » accessibles, sûrs, faciles à utiliser, simples, fiables, sobres et performants ».
@eve : Tu as raison.
Merci de ce billet,
je ne puis qu’aller dans ton sens. A titre d’exemple, il devient parfois difficile d’accéder à des services comme la CAF pour résoudre les « problèmes-qui-ne-rentrent-pas-dans-les-cases ». En Dordogne, il est pratiquement impossible d’avoir un agent au téléphone et le parcours internet revient à se connecter, chercher une info, ne pas la trouver, court-circuiter un agent conversationnel qui répond à côté pour finalement réussir à parvenir à un formulaire permettant d’envoyer un mail à un humain…
Je comprends le souhait de vouloir délester le personnel déjà bien occupé mais on aboutit à un système de filtrage confinant à une sorte d’impossibilité d’accès au droit pour le public en ayant le plus besoin (cet exemple n’est pas une fiction). On peut facilement étendre ça à d’autres organisations hélas…